Nice Jazz Festival 2009 : Keziah Jones amène le funk du Nigeria à Nice
Cette année, je vais vous faire découvrir sur Zik’n’Blog quatre soirées du Nice Jazz Festival. L’édition 2009 a pour particularité de n’utiliser que deux scènes sur les trois, celle des Arènes étant en rénovation. De 19h à minuit, cinq concerts d’une heure se succèdent, alternativement sur la (grande) scène du Jardin et sur la (petite) scène Matisse devant laquelle le parterre de chaises des Arènes a été rajouté. L’avantage de ce dispositif est de supprimer les dilemmes parfois cruels (et les interférences sonores) quand trois bons concerts se jouaient en simultanés. Le risque est de se sentir parfois frustré par la longueur réduite des concerts.
Hier, dimanche 19 juillet, deux grands showmen du blues et du funk se partageaient la tête d’affiche : Lucky Peterson et Keziah Jones. Mais disons quelques mots des autres artistes. En entrée, Nneka était la petite jeune du jour : originaire du Niger, comme Keziah Jones qui a clôturé la soirée, elle allie l’énergie des textes africains à un style R&B teinté de soul. Et sur scène, elle a prouvé avec toute son énergie qu’elle n’était pas du genre à se laisser faire, dénonçant notamment les difficultés vécues par les nigériens. Aldo Romano était la seule véritable caution jazz de la soirée : batteur depuis presque 50 ans, il était accompagné de son vieux complice, l’excellent Henri Texier à la contrebasse, de Mauro Negri à la clarinette et de l’étonnante Géraldine Laurent au saxophone. De ses compositions héritée du free jazz en passant par des improvisations inspirées jusqu’au standard Maple Leaf Rag de Scott Joplin, le set était impeccable, d’une très grande classe. Enfin, Yodelice alias Maxim Nucci était le chaînon manquant entre Peterson et Jones. La plume au chapeau, il a déroulé sa folk lumineuse (son tube « Sunday With a flu« ) en alternance avec quelques ballades rock façon années 70 plus sombres. Accompagné de Xavier à la guitare et de Sébastien au violoncelle, le jeune homme a séduit avec simplicité le public et en particulier les plus jeunes.
Lucky Peterson est un phénomène. Annonçant dès son arrivée sur la scène du jardin être content de revenir à Nice (« Glad to be back »), celui qui est plus habitué au Festival de Juan-Les-Pins s’est senti comme chez lui. Débutant puis terminant le concert à l’orgue, il l’a pour majorité passé à la guitare et notamment pour une bonne part … au milieu du public massé devant la scène! Car Lucky Peterson ne cesse jamais de faire le show, s’amusant à se montrer sous son meilleur profil (son ventre proéminent) ou relançant la deuxième chanson après dix fausses fins. Dirigeant ses trois musiciens, dont l’excellent Rico Mc Farland à la guitare, il incarne le blues de sa voix puissante et de son jeu nerveux de guitare saturée. Il ne s’est laissé aller qu’à une seule balade en début de concert. Le reste est enlevé et éclectique puisque Hendrix et Muddy Waters y côtoient le gospel de Happy Days. Sur une petite heure, le show a ravi les spectateurs qui l’ont vu filer comme une étoile.
De retour lui aussi cinq ans après sa dernière prestation au festival, Keziah Jones a créé l’événement avec son blufunk. Son style si typique, très lié à son extraordinaire façon de jouer en même temps sur sa guitare, la basse, la rythmique et la mélodie, prend sur scène toute sa dimension organique et pénétrante. Et notamment en formule power trio (guitare-basse-batterie) avec deux compères excellents, le batteur Michaël Désir étant éblouissant de virtuosité sur les titres les plus rapides. Keziah Jones arrive sur scène en frappant sur une guitare posée à plat pour affirmer que le blufunk existe (« Blufunk is a fact »), référence à son tout premier album. Il est vêtu d’une chemise verte et rouge du meilleur effet mais qu’il ne portera pas plus de 20 minutes, préférant poser sa guitare contre son torse sec et musclé. Son nouvel album Nigerian Wood, lui permet d’évoquer ses racines et ses influences comme Fela Kuti, inventeur de l’afro-beat, dans un anglais et des tentatives de français pas toujours très clairs. Evoquant sa ville d’origine, Lagos, il semble ainsi nous appeler « les gosses ». Mais actualisant son titre « Lagos vs New York« , il le transforme en « Lagos vs Nice » à base de « yo yo yo » que le public répète. Sur toute la dernière partie du concert, il nous fait participer à « un petit jeu » où le public répète ses phrases chantées ou jouées à la guitare comme il s’amuse à annoncer en français sa chanson « Pass the joint ». Mais la musique n’est jamais oubliée : la voix est toujours magique et son jeu de guitare toujours aussi subtil, percutant et varié puisqu’il s’essaie même au tapping! Finalement, Keziah reprend les deux tubes imparables Beautiful Emily et surtout Rythm is love dans lequel il prend du plaisir à écouter le public chanter en chœur. Passé le rappel, il est déjà minuit et le festival nous laisse sur un peu plus d’une heure de Jones. Mais quelle heure!
Nice Jazz Festival : ce soir retrouvez notamment le jazz de Christian Vander, la voix de Madeleine Peyroux et le blues de Monsieur BB King. Ma chronique dès demain dans Zik’n’Blog.