Archive à Cannes : la beauté secrète d’un groupe à plusieurs têtes
Il y a deux ans, le Festival des Concerts de Septembre au Palais des Festivals de Cannes accueillait déjà le groupe Archive pour une soirée unique où il était accompagné par l’Orchestre Régional de Cannes Provence-Alpes-Côte-D’azur. Un concert magnifique (lire mon article). Depuis, le groupe a enregistré un nouvel album, en partie avec cet orchestre. Il est venu nous le présenter en clôture du festival, ce dimanche 27 septembre, mais sans l’orchestre. Retour sur la soirée en commençant par la première partie.
Si les dieux sont, par définition, les grands créateurs du monde, The Young Gods peuvent désormais être considérés comme les grands re-créateurs de chansons. Le quatuor suisse, pionner en musique rock électronique, était déjà spécialiste en reprises de chansons à sa façon. Avec sa tournée actuelle, il réinterprète aussi ses propres titres dans un style que résume le type des guitares : électro-acoustique. Sur scène, le groupe est comme à la maison : pieds nus ou en chaussettes sur un tapis à motifs, le style est « cosy ». Bernard Trontin, devant sa batterie et ses percussions, domine Franz Treichler (à la voix), Al Comet et Vincent Hänni tous les trois à la guitare. A eux quatre et avec l’aide d’effets électroniques (écho, distorsion …), ils transforment leurs instruments organiques (y compris la voix du chanteur) en objets d’expérimentations électriques, électro voire bruitistes. Tout y passe : percus aux chevilles, guitares transformées en percu ou en sitar, harmonica, mélodica, ukulélé ou même solo de mégaphone !
Franz Treichler, de sa voix chaude, présente les chansons en français. Les titres parcourent toute l’étendue de la carrière du groupe et les textes sont en français (La fille de la mort, Charlotte, Longue route) ou en anglais (Skin Flowers ou Gasoline Man avec un riff façon On the road again). Les reprises font référence aux années 70 (Freedom de Richie Havens ou Ghost Rider de Suicide mêlé au Gardez les esprits du groupe). Plusieurs réservent leur lot de surprise comme cette interprétation de Speak low de Kurt Weil à mille lieues de celle d’Ella Fitzgerald. Entre ambiances planantes et rythmes puissants, The Young Gods font preuve d’une maîtrise et d’une richesse impressionnantes. Si vous ne pouvez les croiser sur la route, plongez-vous dans leur dernier album Knock on Wood enregistré à la façon de ce live étonnant.
Archive est comme une animal à plusieurs têtes. Sur scène, observez Darius Keeler et Danny Griffiths aux synthés entourant Steeve Harris à la guitare, Pollard Berrier et Dave Penney, les deux chanteurs-guitaristes et le bassiste Jonathan Noyce, tous surmontés par un grand œil unique, la batterie de Smiley. En fond de scène, un grand écran reçoit des projections expérimentales majoritairement en noir et blanc comme pour illustrer son subconscient. Et enfin, écoutez. Ecoutez-le gémir dans de longues plages instrumentales, pesantes comme un ciel d’orage qui n’éclate pas. Ecoutez-le hurler des sons de guitares saturées quand la foudre tombe et que sa douleur est au maximum, quand Steeve Harris est projeté en l’air ou à terre par la force de la musique, comme un tentacule qui n’est plus maîtrisé. Ecoutez-le se faire plus doux quand il prend la voix de Maria Q, projetée dans l’écran-souvenir. Ecoutez-le se faire cinglant et percutant quand Rosko John vient déverser son rap, comme un trop-plein de paroles qui ne voulaient pas sortir. Ecoutez-le et vibrez.
Archive vient de publier son nouvel album Controlling Crowds, contrôler les foules. Sur scène, il les renverse en enchaînant depuis le début les neuf premiers titres de l’album : le titre Controlling crowds puis le single Bullets pour commencer. Rosko John intervient sur deux titres (Quiet time et Bastardised Ink), l’image et la voix de Maria Q sont là pour Collapse/Collide. En concert, ces titres prennent une puissance supplémentaire, tendus à l’extrême. Mais les rappels permettent au groupe d’enchaîner trois tubes : annonçant un titre de son premier album, Archive entame Londinium sur lequel Rosko John rappait déjà puis enchaîne sur un System démultiplié et enfin l’incontournable Again. Les musiciens nous quittent après avoir à nouveau remercié la foule. Un regard sur la montre nous prouve qu’Archive a réussi à suspendre le temps : les deux heures de concert sont passées sans qu’on s’en aperçoive. Et si elles étaient sans doute moins magiques qu’il y a deux ans, elles resteront comme un événement à part, beau et puissant, dont seul Archive a le secret.
Concerts de Septembre – Palais des Festivals de Cannes – du 24 au 27 septembre 2009
The Young Gods, site officiel
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Archive, site officiel
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Jamais vraiment écouté et c’est une bonne claque. Malheureusement complet à Nantes.